Pour rappel, tous les sites de la BnF sont fermés les mercredis 25 décembre et 1er janvier.
Éric Seydoux, un artiste à la sensibilité remarquable : entretien avec Frédérique Lucien
L’artiste Frédérique Lucien a travaillé avec Éric Seydoux pendant vingt ans : leur collaboration a été marquée par une complicité féconde. Elle confie dans un entretien le plaisir que lui a procuré ce dialogue créatif au long cours.
Chroniques : Dans quelles circonstances avez-vous rencontré Éric Seydoux ?
Frédérique Lucien : Après avoir découvert mon travail en 1990 lors d’une exposition à la galerie Jean Fournier, un ami d’Éric a pensé qu’une rencontre entre nous pouvait être le début d’une aventure. Il m’a emmenée à son atelier. J’ai été fascinée par le lieu, un vaste espace avec une machine d’impression très sophistiquée, et par l’homme, sa sensibilité et son regard sur l’art. Quelque temps après, en 1991, nous avons réalisé notre première estampe Pistils, qui a nécessité onze passages en presse ! Nous étions emportés par le plaisir d’échanger et de travailler ensemble, c’était assez joyeux et drôle.
Comment a évolué votre collaboration ?
Ensuite, Éric m’a invitée à participer à des manifestations : le Salon des arts graphiques et de l’édition d’art (SAGA) en 1993, la foire d’art contemporain de Bâle en 1997, la FIAC en 1998… Mon engagement avec lui s’est poursuivi d’année en année. Une amitié est née. Il venait régulièrement me voir à l’atelier, pour regarder mon travail, discuter, réfléchir à de nouvelles pistes. Nous avons mené des recherches ensemble. Par exemple, dans la série des pistils que j’avais présentée au SAGA en 1993, Éric a voulu essayer de rendre compte de l’effet graphique du fusain à travers la superposition de couches d’impression différentes, un travail de sérigraphie extrêmement fin et subtil. Éric allait jusqu’au bout et il avait une sensibilité remarquable et un vrai intérêt pour l’art contemporain. Cette connivence entre nous me poussait aussi à passer à son atelier pour découvrir ce sur quoi il travaillait avec d’autres artistes, ce qui enrichissait ma propre palette.
Vous avez réalisé avec lui des projets innovants…
Ces projets nés souvent de la volonté de dépasser des contraintes techniques ont été très stimulants. À l’initiative d’Éric, qui souhaitait réaliser des cartes postales à diffuser lors des salons d’art, j’ai par exemple réfléchi sur des suites d’images produites en sérigraphie, que l’on pourrait à la fois présenter au mur et vendre en tant que cartes. Ainsi est née « Courbes et Méditerranée », une série abstraite d’éléments qui, mis bout à bout, forment une très longue pièce. La contrainte initiale est devenue source de créativité.
Quels sont vos liens avec la BnF en tant qu’artiste
Le dépôt légal est important pour moi ; il permet de garder trace des œuvres réalisées. Nous avons, avec Éric Seydoux, déposé nos productions à la BnF autant que possible. Et la BnF m’a accompagnée en achetant des œuvres au cours de ces quelque quarante années, ce qui a renforcé les liens avec les ateliers qui les produisaient.
Propos recueillis par Sylvie Lisiecki
Entretien paru dans Chroniques n° 98, septembre-décembre 2023