
Sara, langages de papier
Galerie des Donateurs
À l’occasion de la donation faite à la BnF d’un bel ensemble d’originaux et de dessins préparatoires de l’artiste, une exposition rend hommage à l’autrice et illustratrice Sara (1950 - 2023), figure majeure de la littérature pour la jeunesse.
« Mes images n’illustrent pas, elles sont le texte. Déchirer du papier, c’est un langage. »
Alors qu’elle est maquettiste dans la presse dans les années 1970, Sara compose chez elle des tableaux de papiers déchirés avec un art consommé de la mise en page et du cadrage. En 1990, elle fait paraître chez Épigones un premier album sans texte, À travers la ville. Par la suite, fidèle à cette technique du papier déchiré qu’elle manie avec une dextérité considérable et qui lui permet de développer un puissant langage pictural, elle publie entre 1990 et 2018 une quarantaine d’albums chez plus de 16 éditeurs différents. Ses œuvres ont été récompensées et exposées à de multiples reprises.
Le don
Sara a fait don en 2022 au Centre national de la littérature pour la jeunesse à la BnF de 533 originaux et dessins préparatoires correspondant à 21 de ses albums les plus emblématiques, depuis À travers la ville (1990 ) jusqu’à La Traque (2018). Les études utilisent des techniques mixtes, papiers déchirés, dessins au crayon, au feutre, à l’encre, à la gouache et toutes les planches originales sont réalisées selon la technique des papiers déchirés. Ce don inclut À quai, un petit film de 4 minutes réalisé par Sara et Pierre Volto en 2005, présenté dans l’exposition.
L’exposition
L’émotion des papiers déchirés
En dépit des quelques textes, très sobres, qu’elle concède à ses éditeurs, elle se méfie des mots et se fait activiste de l’image, cherchant à rendre le lecteur auteur de son propre regard. Elle sélectionne ses papiers et conçoit soigneusement ses créations. Jouant avec les textures et les couleurs, elle offre une narration sensible à ses héros de papiers – humains ou animaux – avec des albums forts comme Éléphants (2006) ou La Revanche du clown (2011). Ses mises en page, remarquablement réfléchies, viennent dérouler le récit avec beaucoup d’émotions. Au fil des albums, Sara met en place une forme de grammaire visuelle, réutilisant certains motifs comme autant de mots-clés ouvrant les portes de l’imaginaire. Son vocabulaire de papier est fait de personnages et de lieux récurrents : la femme en rouge et le chien jaune dans Mon chien et moi (1995) ou À quai (2005) ; le chat solitaire de La Nuit sans lune (1994) ou du Chat des collines (1998) ; les forêts du Loup (2000) ou de La Traque (2018). Son langage esthétique est structuré par des lignes verticales omniprésentes (rayures, grilles, barreaux, troncs, colonnes) et des formes courbes (nuages, boules, bulles, astres) avec lesquelles elle joue, les mélangeant parfois comme les rayures du chapiteau de La Revanche du clown ou les arabesques dont elle parsème ses planches. Elle s’appuie sur cette trame pour exprimer les émotions qu’elle souhaite partager avec ses lecteurs. Il en résulte des albums simples et profonds, parfois durs, toujours magnifiques, qui parlent de solitude, de rencontres, de liberté, de deuils parfois, à destination des enfants comme des adultes.
Un nouveau regard sur les contes
Elle sait aussi se mettre au service des autres et éclairer leurs mots de ses images. Sara crée plusieurs albums où elle reconfigure graphiquement les textes classiques, fables et contes, publiés avec leur texte originel. Après Les Métamorphoses d’Ovide (2007) et les Fables de La Fontaine (2012), elle illustre deux contes des frères Grimm, Le Roi-Grenouille ou Henri-le-Ferré (2013) et Blancheneige (2014), et deux contes de Charles Perrault, La Barbe bleue (2016) et Le Chat botté (2023). Dans son approche artistique, Sara donne à voir des scènes rarement illustrées (comme le châtiment final de la marâtre de Blancheneige) ou propose des cadrages audacieux (comme la découverte du cabinet macabre de la Barbe bleue). Elle offre ainsi un nouveau regard sur ces textes, renouvelant en profondeur leur compréhension.
Commissariat
Corinne Bouquin, Ghislaine Chagrot et Clarisse Gadala, chargées de collections en littérature de jeunesse, Centre national de la littérature pour la jeunesse, département Littérature et art, BnF
Infos pratiques

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Horaires

Mardi au samedi :
10 h - 19 h
Dimanche :
13 h - 19 h
Fermé le lundi et les jours fériés.
Accès

Bibliothèque François-Mitterrand – Galerie des donateurs
Quai François Mauriac,
75706 Paris Cedex 13