Charles Baudelaire et sa mère
Caroline Aupick, mère de Charles Baudelaire
Qui est la mère de Baudelaire ? Caroline Dufaÿs est née à Londres en 1793, fille d’émigrés français ayant fui la Révolution. Orpheline à sept ans, elle est élevée par l’avocat Pierre Pérignon et sa femme, connaissances de sa mère. En 1819, elle épouse un ami de ses protecteurs, Joseph-François Baudelaire, fonctionnaire au Sénat et peintre amateur, de 34 ans son aîné. De cette union naît en 1821 un fils, Charles, qui n’a que cinq ans quand son père meurt. Caroline Baudelaire se remarie alors avec le commandant Jacques Aupick. Veuve une seconde fois en 1857, elle quitte Paris pour Honfleur où elle vivra jusqu’à son décès en 1871.
D’aimantes relations unissent Charles à sa famille jusqu’au choix du jeune homme d’embrasser une carrière littéraire : l’incompréhension de ses parents est totale devant un projet professionnel aussi éloigné des valeurs et des codes de la bourgeoisie dans lesquels ils l’ont élevé. À sa majorité, Charles hérite de son père et dilapide rapidement une partie de la somme reçue. Face à ce comportement dispendieux, Caroline Aupick se trouve contrainte, en 1844, de placer son fils sous la tutelle d’un conseil judiciaire représenté par le notaire Narcisse Ancelle.
Tout le reste de sa vie, Charles le lui reprochera, se sentant trahi et humilié par cette décision : « N’y a-t-il pas une cruauté incroyable à me soumettre à l’arbitrage de quelques hommes que cela ennuie, et qui ne me connaissent pas. […] je me regardes [sic] comme condamné par toi […] : tu me fais sciemment et volontairement une peine infinie, dont tu ne sais pas tout le poignant » (été 1844).
Les lettres à sa mère
Couvrant plus de trente années de l’existence du poète - 1834-1866 -, les 350 lettres à sa mère connues à ce jour témoignent de l’amour dévorant qu’il éprouvait pour elle. Dans ses lettres de collégien, on y lit son affection filiale et la crainte de mécontenter ses parents par ses notes et son comportement qui le prive souvent de sorties - Baudelaire est interne. À l’âge adulte, il est habité de la même inquiétude de lui faire de la peine. À sa mère, il parle de tout : de sa santé, de plus en plus fragile avec les années ; de sa gêne financière qui l’amène à lui demander de l’argent, presque dans chaque lettre ; de ses aspirations, de ses projets d’écriture, de la publication de ses textes, de ses échanges avec les éditeurs ; de sa relation avec sa maîtresse Jeanne Duval ; enfin, de ce qu’il ressent pour elle, un amour exclusif, violent, source autant de bonheur que de souffrance.
Il ne reste aucune lettre de Caroline Aupick à son fils : gardées par Baudelaire jusqu’à la fin de sa vie, il est fort probable que sa mère les ait détruites après la mort du poète en 1866. Mais, par quelques lettres de Caroline Aupick à Narcisse Ancelle, on perçoit son immense amour pour son fils et sa douleur de le voir si malheureux et démuni : « Tout cela est bien inquiétant et me préoccupe péniblement. Les années marchent, marchent sans apporter aucune amélioration chez lui, et la mort viendra me prendre, sans que j’ai eu la satisfaction de le voir changé » (29 octobre 1864).
51 lettres de Baudelaire à sa mère sont conservées à la BnF, numérisées et accessibles librement dans Gallica. L’intégralité des 350 lettres est disponible dans l’édition établie par Catherine Delons en 2017 aux éditions Manucius .