Le Collège et la Bibliothèque

Le partenariat scientifique et culturel qui lie le Collège de France et la BnF depuis 2019 a été récemment renforcé par une convention de pôle associé documentaire. L’occasion de revenir sur l’histoire commune des deux institutions et sur leurs nombreuses relations tant dans le domaine de la recherche que de l’enseignement.

 

« Docet omnia » (on enseigne tout) est la devise du Collège de France - 2024 - Illustration Claire Ardenti/BnF

 

Si les visiteurs du Collège de France sont accueillis dans la cour par un Jean-François Champollion d’un marbre étincelant, les notes de travail du père de l’égyptologie sont conservées à la BnF. C’est loin d’être le seul rapprochement entre deux institutions dont les histoires n’ont cessé de se croiser depuis leurs créations respectives, toutes deux sous François Ier. Gilles Pécout, président de la BnF, l’affirme d’emblée : « La convention de partenariat scientifique et culturel qui unit les deux établissements depuis 2019 s’appuie sur cette dynamique : depuis plusieurs siècles, la vie de la recherche et de l’enseignement au Collège de France interagit avec les collections patrimoniales, leur acquisition, leur description. » Plusieurs disciplines et compétences scientifiques ont ainsi émergé autour de fonds rares et précieux – pensons à la papyrologie – et de nombreux professeurs du Collège ont été attachés, à un moment de leur carrière, à la Bibliothèque – tel l’historien Emmanuel Le Roy Ladurie.

Favoriser une sociabilité savante

Le partenariat actuel permet à la fois de rendre plus visibles et d’intensifier les échanges scientifiques entre les deux établissements : au-delà des relations interpersonnelles, il s’agit de favoriser une véritable sociabilité savante qui fasse émerger des projets et des problématiques nouvelles. Comme l’indique Thomas Römer, administrateur du Collège de France : « Notre longue histoire commune trouve aujourd’hui de nouveaux développements, à l’intersection de la recherche et du document, désormais amplifiée par la révolution numérique. Nos missions partagées de préservation et de diffusion des savoirs, qui sont plus que jamais d’actualité, se renforcent par des voies qui combinent nos expertises et nos spécialités. J’y vois de nombreuses occasions d’emmener nos établissements vers des projets toujours plus partagés. » En témoigne la première action commune, décidée en 2019 : cofinancer chaque année un contrat postdoctoral, rattaché à une chaire du Collège et accueilli dans un département de collections. Julien Auber de Lapierre a ainsi contribué à éclairer l’histoire de la collection de papyrus de la BnF, la plus ancienne conservée en France (voir Chroniques n°94) ; Zhang Rui achève en ce moment l’étude d’un fonds d’estampes chinoises aussi rare que remarquable du XIIIe au XXe siècle, qu’elle contribue à faire connaître à la communauté internationale (voir Chroniques n°98). La jeune chercheuse a également participé à la sélection de pièces pour une vitrine du musée de la BnF dédiée aux fonds chinois du département des Estampes, visible à partir de septembre. Enfin, Gabriel Darriulat commence en octobre un travail de recherche sur le fonds de l’abbé Grégoire autour de la traite et  de l’esclavage, conservé à la bibliothèque de l’Arsenal.

Des collaborations multiples 

Au-delà de ces échanges savants et des événements publics auxquels ils donnent lieu – citons le colloque international « Édouard Chavannes et la sinologie moderne en France » les 14 et 15 octobre prochains –, le partenariat a également permis des collaborations dans le domaine de la formation, des expositions et, récemment, du numérique : le Collège de France est désormais, depuis avril dernier, un pôle associé documentaire de la BnF. Les captations audiovisuelles des leçons inaugurales et des cours entreront prochainement dans les collections du département Son, vidéo et multimédia et seront librement accessibles dans Gallica. Ainsi, la Bibliothèque contribue à l’une des missions du Collège de France : « Enseigner la recherche en train de se faire », une recherche à la fois libre et rigoureuse, personnelle et attentive à la société dans laquelle elle s’inscrit. C’est ce dont témoignera le cycle de conférences scientifiques organisé à la fin de l’année sur le site Richelieu par le professeur Denis Duboule, titulaire de la chaire Évolution du développement et des génomes, et le département Sciences et techniques de la BnF. Son titre « Le Collège à la Bibliothèque » dit plus qu’un accueil temporaire, une présence naturelle.

Philippe Chevallier

Article paru dans Chroniques n° 101, septembre-décembre 2024