Le XIXe siècle connaît un essor sans précédent de la presse, et plus particulièrement des quotidiens. Plus nombreux, de plus en plus lus, les journaux doivent une partie de leur succès à la parution régulière de romans-feuilletons. Chaque « tranche » du roman y est publiée jour après jour dans la partie inférieure du journal – en bas de la page, dans ce qu’on appelle le « rez-de-chaussée » ou le « feuilleton ». Ce dispositif de publication maintient le lecteur en haleine, l’invitant à acheter le prochain numéro pour découvrir ce qui se cache derrière chaque « À suivre », à la manière des feuilletons télévisés auxquels il donnera son nom. Il se développe largement, et rares sont les romans de l’époque qui ne sont pas d’abord publiés dans la presse avant d’être vendus sous forme de livre : c’est vrai des Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas comme de Germinal d’Émile Zola. Des textes relevant d’autres genres, comme les récits courts ou les nouvelles, paraissent aussi de cette façon : la littérature envahit la presse. Certains romanciers deviendront des professionnels du feuilleton, comme Ponson du Terrail, mais on croise également dans le rez-de-chaussée ceux qui deviendront des classiques, comme Balzac ou Huysmans.
De nouvelles pages dans Gallica, consacrées aux « Feuilletons dans la presse », permettent de découvrir ces romans, fameux ou aujourd’hui oubliés, dans cette forme si populaire au XIXe siècle. Des entrées par auteur donnent accès aux œuvres dans le journal numérisé qui les a publiées en feuilleton, mais aussi sous forme de livre. La sélection propose un choix allant du roi du feuilleton, Eugène Sue, à des noms plus surprenants comme celui d’Alphonse Daudet. Une entrée par thème, également pensée pour une pratique pédagogique, donne accès directement à une série d’extraits, dans les pages des journaux numérisés, autour de l’amour, la violence, l’argent, le progrès technique…
Ce nouvel outil de Gallica est au cœur de la journée consacrée aux « Feuilletons dans la presse » (10 avril 2021). Après une conférence d’ouverture présentant le roman-feuilleton, un deuxième temps propose un point sur l’actualité de la recherche dynamique autour de ces textes, tant du côté de la numérisation et de son exploitation que du côté de l’histoire générale des médias et de la genèse des textes littéraires. Viendront ensuite des parcours spécifiques proposés par des chercheurs et des enseignants : on découvrira par exemple Alexandre Dumas feuilletoniste et aussi des cas pratiques d’utilisation de la sélection pour l’enseignement des Lettres. Une occasion d’explorer le roman-feuilleton plus en profondeur, mais aussi les liens entre la presse de l’époque et la littérature.
Morgane Avellaneda et Sophie Robert
