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Hommage à Michelle Porte

Marguerite Duras et Michelle Porte sur le tournage du film Baxter, Vera Baxter - 1976 - Collection Michelle Porte

La Bibliothèque nationale de France rend hommage à la réalisatrice et productrice Michelle Porte, décédée à Paris le 26 septembre 2024, et s’associe à la douleur de sa famille et de ses proches.

Après des études scientifiques qu’elle laisse inachevées, Michelle Porte souhaite « raconter des histoires par le moyen de l’image ». Elle frappe à la porte de l’ORTF où elle est engagée par Pierre Schaeffer au service de la recherche en 1963, puis par Suzanne Baron, qui prépare un film de montage sur la Seconde Guerre mondiale. En 1966, Michelle Porte apprend que Marguerite Duras, qu’elle admire, va adapter au cinéma sa pièce La Musica. Elle cherche son numéro de téléphone, l’appelle et la rencontre pour demander à faire partie de l’équipe technique. Duras la loge chez elle à Deauville. Michelle Porte accompagne le tournage et devient amie avec l’écrivain. Elle sera ensuite son assistante pour Détruire, dit-elle (1969) et participe à India Song (1974) et Baxter, Véra Baxter (1976). Cette complicité la conduit à son premier film en tant que réalisatrice, Les Lieux de Marguerite Duras (1976), dans lequel elle est la première à mettre en évidence, selon Joëlle Pagès-Pindon, « la dimension matricielle des lieux dans la création durassienne ». Le film est d’ailleurs prolongé par l’édition de deux ouvrages aux Éditions de Minuit en 1977, signés par les deux femmes : Les Lieux de Marguerite Duras et Le Camion (suivi de) Entretien avec Michelle Porte. La réalisatrice tourne ensuite Savannah Bay, c’est toi en 1984, qui plonge le spectateur au cœur de la création de la pièce avec Madeleine Renaud et Bulle Ogier ; avant une adaptation de L’Après-midi de Monsieur Andesmas en 2004.

En parallèle, elle construit une œuvre filmique passionnante, en continuant à composer des portraits d’écrivains à travers leurs lieux - Les Lieux de Virginia Woolf (1980), La Princesse Palatine à Versailles (1985), Edmond Jabès (1989), Françoise Sagan (1996), Les mots comme des pierres : Annie Ernaux, écrivain (2013) – et plus largement des portraits d’artistes avec À la recherche de Carl Theodor Dreyer (1987) et les nombreux plasticiens qu’elles filment à partir des années 1990 : le peintre Jean Degottex (1992), Christian Boltanski (1992), Jean-Pierre Raynaud (1993) ou encore sa compagne la sculptrice Marie-Pierre Thiébaut, décédée en 2010 et dont elle a contribué à faire mieux connaître le travail.

Ses films sont souvent très documentés, appuyés sur de nombreuses lectures en bibliothèques et en archives, avec la volonté de s’immerger dans chaque sujet. En 1982, elle réalise La Peste. Marseille, 1720, pour lequel elle invente un narrateur fictif, notable dont le journal est construit à partir de la masse des documents qu’elle a consultés et dont elle raconte, dans ses entretiens avec Jean Cléder, qu’il aurait trompé Jean-Noël Biraben, historien spécialiste du sujet, ce dernier croyant d’abord avoir affaire, à la sortie du film, à une source lui ayant échappé. La fiction n’est ainsi pas absente de l’œuvre de la cinéaste. Outre l’adaptation de Duras, elle a réalisé Le Gardien du feu d’après Anatole Le Braz (1994) et a longuement travaillé à La Route des Flandres de Claude Simon sans pouvoir mener le projet à son terme.

En 2021, 2023 et 2024, Michelle Porte a consenti plusieurs dons importants à la Bibliothèque nationale de France : outre l’intégralité de ses films, signalés au catalogue général, elle a donné ses archives personnelles ainsi que sa correspondance avec Marguerite Duras. Ce magnifique ensemble est décrit dans le catalogue BnF - Archives et manuscrits. Il s’accompagne de onze documentaires dont elle détenait les droits, désormais accessibles à tous sur la bibliothèque numérique Gallica, auxquels s’ajoutent Françoise Sagan (1996) et Maud Linder par Michelle Porte (2019) grâce à l’aimable autorisation des producteurs Olivier Mille (Artline) et Clara Pasi (Arimages).

 

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