Au pied du Sinaï

Édition originale. Dix lithographies originales en noir à pleines pages, la couverture illustrée d’une lithographie en quatre couleurs, cinq culs-de-lampe en simili d’après des dessins.

« Livre de peintre » inséparable de l’affaire Dreyfus, Au pied du Sinaï est sans doute le plus méconnu de tous les livres illustrés par Henri de Toulouse-Lautrec. « J’accuse », le réquisitoire d’Émile Zola contre la justice militaire, a paru le 13 janvier 1898 dans L’Aurore. Au cours du procès intenté en février contre le romancier et ce journal, Georges Clemenceau, qui n’est pas avocat, a plaidé lui-même pour les défendre. Clemenceau pensait en homme de gauche que poser la « question juive » revenait à caricaturer la question sociale, sans y apporter de solution. L’appel final à la communauté des opprimés, « chrétiens de Paris ou juifs de Busk », dut toucher Toulouse-Lautrec : pour illustrer le texte au plus près, il entreprit lui aussi un véritable reportage dans le quartier de la Tournelle. Les planches qui s’en inspirent sont comme un écho à sa propre misère, et donnent à cette illustration un ton de gravité inhabituel. Il semble que cet exemplaire soit le seul en reliure décorée strictement contemporaine. Celle-ci est signée de Marius-Michel dont la composition calligraphique Art nouveau est singulièrement sobre.