Les reliures de la Réserve des Livres rares
Les reliures historiques
Les souverains français ont toujours marqué un certain intérêt pour les reliures des livres qui les entouraient. Il était admis que celles-ci faisaient partie des signes de leur pouvoir. Cette permanence singulière n’a faibli que lors du Second Empire et s’est évanouie pour les présidents de la République.
À partir de 1545, François Ier encouragea un prestigieux et ample programme de reliures à décor initialement destiné aux manuscrits grecs réunis pour la constitution d’une bibliothèque savante pour un Collège royal toujours en projet. Le report de ce projet entraîna une destination nouvelle à ces volumes, au château de Fontainebleau nouvellement aménagé. Cet ensemble incomparable, à nouveau transféré à Paris dès la fin des années 1560, est resté quasiment intact et il se partage désormais entre le département des Manuscrits et la Réserve des livres rares. La Réserve à elle seule en conserve plus de 200, dont la série des grands décors uniques réalisés de 1552 à 1559. Henri II développait par là un projet formé vingt ans plus tôt pendant le règne de son père François Ier, également pour la bibliothèque de Fontainebleau alors naissante. Projet précurseur, mais moins spectaculaire car l’« art » de la reliure ne connaissait pas vers 1530 le même épanouissement. Il en subsiste aussi deux centaines de pièces à la Réserve. Bien qu’elles soient sans décor, c’est dans cette lignée programmée qu’il faut inscrire la masse de reliure en maroquin rouge commandée par Colbert au XVIIe siècle et poursuivie jusqu’à la Révolution.
Les reliures artistiques
Aux XIXe et XXe siècles, les reliures remarquables continuent d’affluer assez régulièrement à la Réserve. Le XIXe siècle marque cependant une rupture pour la constitution du fonds, avec des entrées qui se font, sauf exception, davantage au coup par coup. Il y a des exceptions notables, comme l’entrée de la collection de Maurice Audéoud, qui fit entrer à la Réserve le premier bel ensemble de reliures « Art nouveau » de la Bibliothèque nationale.
Après la Seconde Guerre mondiale, des commandes et des dons permettent d’accroître la collection de reliures artistiques. Entrent dans la collection des œuvres de Rose Adler, Paul Bonet, Germaine de Coster et Hélène Dumas, Georges Cretté, Henri Creuzevault, Pierre-Lucien Martin. La reliure d’art plus récent est également représentée, avec les commandes auprès de créateurs contemporains comme Georges Leroux, Monique Mathieu, Renaud Vernier et Jean de Gonet. Cette politique de commande reste d’actualité en ce début de XXIe siècle.
Reliure de La Chanson de Rollant, réalisée par Monique Mathieu. Amsterdam : Picaron éditions, 1992