Louise Michel, une héroïne de la Commune
D’institutrice à combattante
Dès la chute de l’Empire en septembre 1870, Louise Michel, alors institutrice à Montmartre, intensifie son activité politique. Elle rallie le clan des opposants au nouveau gouvernement et entre dans le Comité de vigilance de Montmartre que vient de créer le maire du 18e arrondissement, Georges Clemenceau. Au printemps 1871, elle s’engage comme garde dans le 61e bataillon de la butte.
« Elle aussi, la grande pitié pour les faibles, l’avait fait verser contre les forts. Pour empêcher qu’on tuât, elle tuait », commente Clemenceau dans un article du quotidien La Justice consacré à Louise Michel.
Le carnet de Louise Michel
Pour faire libérer sa mère, Louise Michel se rend le 24 mai 1871. Passant de prison en prison pendant deux ans, elle est finalement déportée, avec d’autres communards, à Nouméa en Nouvelle-Calédonie, et y reste jusqu’à son amnistie en 1880. Comme témoignage de cette déportation, il reste, au-delà des textes publiés (Légendes et chansons de gestes canaques et La Misère), un émouvant carnet à cartonnage rouge de 10 cm de haut sur 14 cm de large, adressé à ses « chers parents, amis et amies ».
Dans ce carnet daté du 12 août 1875, Louise Michel alterne, sur 38 feuillets, lettres, dont une adressée à son « maître » Victor Hugo, « confidences » et poème, textes canaques, ainsi que dessins et fleurs séchées.
Elle se montre pleine d’attention pour ses proches, les remerciant pour les « paquets » envoyés, leur dédiant des fleurs séchées en « souvenirs d’exil », dessinant à la plume un « plan de [ses] jardins pour maman », enfin, les rassurant sur ses conditions de détention et son état de santé : « Soyez tranquille à mon sujet, je me porte parfaitement et je suis environnée d’anciens amis qui se sont faits prendre on le croirait tout exprès pour venir me rejoindre » (f. 1 v.).
Ce carnet est un morceau de vie : en le feuilletant, on imagine aisément Louise Michel écouter et noter contes et chants de la population canaque, faire de la botanique et des plantations (blé noir, pois, orge, etc.), méditer et composer des poèmes tout autant lyriques qu’engagés :
Mais je ne souffre plus d’interroger ces ombres
L’exil comme la nuit d’astres est constellé
Et l’on voit par delà les vastes déserts sombres
Le progrès calme et fort si longtemps appelé
À son retour de Nouvelle-Calédonie, Louise Michel offre cet album de souvenirs à Georges Clemenceau, ami et grand admirateur de la « Vierge rouge », qui, pendant sa déportation, l’a soutenue financièrement et s’est battu pour l’amnistie des communards. C’est ainsi que conservé avec soin par le Tigre, ce carnet est entré dans les collections du département des Manuscrits de la BnF en 2003, avec le reste des papiers de Georges Clemenceau.