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Editions princeps et éditions originales
Editions princeps
Définition
Au sens strict, une « édition princeps » désigne la première édition imprimée d’un texte dont l’auteur a vécu avant l’invention de l’imprimerie. En ce sens restreint, la majorité des éditions princeps datent des XVe et XVIe siècles et concernent les auteurs grecs et latins de l’Antiquité. Par extension, le terme d’ « édition princeps » peut s’appliquer à la première occurrence imprimée de toute œuvre quelle qu’elle soit. Enfin, dans un sens plus moderne et plus bibliophilique, l’usage de l’expression « édition originale » renvoie à la première édition publiée avec le consentement de l’auteur.
Auteurs de l’Antiquité
Les éditions princeps des auteurs de l’Antiquité occupent une place de choix parmi les raretés que recherchent au XVIIIe siècle les premiers grands collectionneurs de livres anciens. La Réserve en possède une collection importante, souvent en plusieurs exemplaires. Rapportées de Naples par Charles VIII ou acquises par François Ier, un certain nombre d’entre elles faisaient parties de la Bibliothèque du roi dès le XVIe siècle. De par leurs ornements peints, leurs annotations manuscrites, leur provenance ou leur reliure, certains exemplaires imprimés en Italie comptent parmi les livres les plus remarquables du fonds d’incunables de la Réserve.
Enéide, Virgile (0070-0019 av. J.-C.), éditeur, Rome, Konrad Sweynheym et Arnold Pannartz, vers 1469.
Littérature médiévale
Les collections de littérature médiévale, formées dès 1733 à partir du cabinet d’antiquités gauloises de Cangé, sont aussi d’une très grande richesse. Parmi les plus anciennes éditions d’écrivains français de la fin du XVe siècle, citons le Blason de faulses amours de Guillaume Alexis (Paris, 1486) et la célèbre première édition conservée des œuvres de Villon (Paris, 1489), que l’on inclut traditionnellement dans la liste des éditions originales, quoique probablement publiée après la mort de l’auteur. De cette édition, illustrée de bois fameux, deux des trois exemplaires connus sont la Réserve.
Editions originales
L’usage du terme « édition originale » dans le sens moderne et bibliophilique — première édition publiée avec le consentement de l’auteur — apparaît dans les descriptions de catalogues de vente des années 1840 (ventes Taschereau, 1841, et Nodier, 1844). Elle devient d’emploi courant dans la décennie suivante. Le goût des éditions originales d’œuvres littéraires, qui constitue jusqu’à aujourd’hui l’un des aspects essentiels de la bibliophilie française, n’est guère antérieure à ces années, à l’exception notable des amateurs de littérature médiévale dont l’intérêt pour les « antiquités gauloises » est un des points forts de la haute bibliophilie du XVIIIe siècle.
De nature encyclopédique, la collection de la Réserve rassemble notamment les éditions originales des textes modernes qui occupent une place fondatrice ou remarquable dans la culture occidentale : textes littéraires (Rabelais, Montaigne, Cervantès, Shakespeare, Goethe, Baudelaire, Rimbaud…), philosophiques (Descartes, Hobbes, Diderot, Kant…), théologiques, scientifiques et techniques (Copernic, Galilée, Kepler, Paré, Linné…), historiques et géographiques, juridiques, politiques et économiques (Bodin, Champlain, Mun, Rudbeck, Quesnay…).
L’intérêt toujours croissant porté à la genèse d’une œuvre amène à rechercher les étapes intermédiaires du texte de l’édition originale : maquettes, jeux d’épreuves (qui deviennent d’usage courant au tournant des XVIIIe et XIXe siècles), exemplaire revêtu de corrections manuscrites par l’auteur. Signalons dans les collections de la Réserve les épreuves corrigés de La Vendetta de Balzac, celles de Volupté de Sainte-Beuve, la maquette de Mallarmé pour les Poèmes d’Edgar Poe et des épreuves corrigées du Coup de dé, un exemplaire d’épreuve d’À l’ombre des jeunes filles en fleurs, avec d’importantes corrections d’épreuves, les premières épreuves corrigés d’Alcools d’Apollinaire, les épreuves corrigés de Mort à crédit de Céline.